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La Périchole

Revue et gazette musicale de Paris – 18 octobre 1868

Voici l’opinion de quelques-uns des principaux organes de la presse sur l’oeuvre nouvelle d’Offenbach :

Que l’apparition de la Périchole aux Variétés ait soulevé, le premier jour, des vagues dont, la colère et la hauteur ont été si bien décrites par Virgile ; que l’esquif de Jacques Offenbach ait été tantôt soulevé jusqu’à la crête du flot, puis replongé dans le gouffre ; qu’importe !

Que le succès — et l’on ne sait pourquoi — n’ait pas été au second acte une affaire de bonne humeur entre l’auteur et le public, qu’importe !

Qu’importe encore que cette victoire soit un viol !

N’est-ce pas à chaque fois et invariablement le même bulletin ? Quelques blessés, quelques morts çà et là, des pertes sensibles, comme on dit dans le langage atténuatif des batailles.

Mais le triomphe ! Il est sûr... Ce n’est pas en vain que nous aurons comparé Offenbach à Alexandre le Grand. Il se promène à travers tous les théâtres comme faisait le Macédonien à travers l’Asie. Il annexe et garde ses annexions.

(Constitutionnel.)
Nestor Roqueplan.

La partition écrite par M. Offenbach sur ce canevas d’une plaisanterie folle a les vives allures du style de ce compositeur heureux et populaire. On y a applaudi de très-jolis couplets, un finale, un chœur de femmes et la lettre de la Périchole, la page attendrie de cette nusique enragée que Mlle Schneider dit avec beaucoup de charme et de sensibilité.

(La Presse.)
B. Jouvin.

... La Périchole, c’est Hortense Schneider. Hortense Schneider, c’est une vraie artiste et la plus profondément parisienne des artistes qui règnent sur Paris.

Evidemment, Jupiter, un jour qu’il daignait songer à nos plaisirs, créa pour se compléter les uns les autres Meilhac et Halévy, Offenbach et Mlle Schneider, sans oublier Dupuis.

Ce que produit la conjonction de toutes ces étoiles de même famille est d’autant plus charmant à nos yeux que le charme intime en échappe à beaucoup de gens : Meilhac a mis de la littérature dans la cascade et du bon sens dans l’insenséisme ; Offenbach, de la mélodie, de la grâce et du sentiment dans la caricature, et Mlle Schneider, une séduction toute parisienne, — distinguée et triviale tour à tour, — dans les aventures les plus risquées, de même que Dupuis a beaucoup de correction dans sa bouffonnerie.

On a bissé quatre, cinq, six morceaux. Le trio chanté pour voix d’hommes à l’éloge des petites femmes a fait fureur, au second acte, ainsi que le chœur comique des demoiselles d’honneur demandant au seigneur Piquillo des nouvelles de sa femme, qui est si peu à lui.

On critiquera d’un côté ; on louera de l’autre, et tout sera pour le mieux dans l’intérêt du théâtre et des auteurs.

(Gazette des Etrangers.)
H. de Pène.

Je veux dire immédiatement que je ne m’associe aucunement aux sévérités que le public a manifestées le premier soir. On peut m’en croire, je ne suis pas suspect de partialité à l’égard du genre et des auteurs. Je trouve que, dans cette circonstance, MM. Meilhac, Halévy, Offenbach ont fait des efforts pour relever leur manière : pièce et musique sont incontestablement plus délicates que les précédentes. Est-ce à cause de cela que le public s’est gendarmé ? Est-il à ce point ancré dans ses mauvaises mœurs qu’un léger retour vers le bon goût contrarie ses plus chères habitudes ?

Le compliment que j’adresse à la pièce, j’en reporte une bonne part à Mlle Schneider : elle s’est contenue, elle a mis une sourdine à ses trivialités, et comme elle a gardé son esprit, sa voix charmante, sa grâce originale, elle a été, à mon avis, plus séduisante que jamais. Encore une fois, — j’ose le répéter, — qu’on veuille m’en croire, car, en vérité, sur tous ces points je ne suis pas suspect.

(Le Pays.)
G. de Saint-Valery.

... Avec cette donnée fort simple, exempte de toute péripétie, les auteurs ont composé deux actes très-amusants et très-spirituels. Ils se sont fort habilement tirés d’une situation scabreuse au second acte, et ils ont prouvé une fois de plus que s’ils côtoyaient souvent les écueils, ils savaient, en pilotes habiles, ne point faire sombrer le bon goût.

Quant à la musique de M. Offenbach, elle est charmante d’un bout à l’autre. Tous les morceaux ont eu un grand succès, et plusieurs ont été bissés. Cet hiver, dans tous les salons, on valsera et on polkera sur les airs de la Périchole. Il serait impossible de rêver un compositeur plus Parisien que ne l’est M. Offenbach. Sa verve intarissable est comme un écho spirituel et railleur des bruits de ce Paris frivole et léger qui depuis quelques années semble demander ses éclats de rire à ce talent à la mode. Il importe de signaler l’air sur lequel la Périchole apprend à son amant qu’elle va le tromper. Il y a dans ce morceau une tendresse exquise qui en fait le digne pendant de la Chanson de Fortunio.

(Moniteur universel.)
Gustave Claudin.

Ce qui m’a frappé, dès le premier acte de la Périchole, c’est que le sujet, s’il était traité avec moins de réalisme et de travestissements, prêterait parfaitement à un opéra-comique. Un instant l’action tourne même au sérieux ; la lecture de la lettre, dont la mélodie est très-jolie, pleine de sentiment, et très-bien dite par Mlle Schneider, laisse à l’auditoire une impression qui persiste jusqu’à la fin de l’acte, malgré le galop de la scène du mariage. En général, la musique, écrite avec un très grand soin, pourrait, en majeure partie, s’appliquer à un opéra-comique. Les auditeurs qui s’attendent à des mélodies égrillardes comme dans la Belle Hélène, n’en trouveront guère. Les morceaux de chant ne sont pas bien nombreux ; mais le compositeur était évidemment limité par les moyens des auteurs, surtout des hommes. Mlle Schneider et les choristes lui offraient le plus de ressources ; aussi les chœurs, tantôt comiques, tantôt bouffes, produisent-ils presque tous très-bon effet. Par exception, la citation d’un passage de la Favorite : « Quel marché de bassesse, etc., » est plaisante, parce que M. Offenbach n’avait rien à changer à la musique pour la rendre burlesque. Plus l’action avance, plus le côté bouffe tend il dominer ; et cependant, à y regarder de près, les deux personnages principaux ont peine à paraître bouffes, car leur situation reste au fond très-sérieuse, et l’on est peu porté à rire du pauvre Piquillo... Pour être moins volumineuse que la partition de la Grande-Duchesse, celle de la Périchole n’en mérite pas moins de prendre rang à côté d’elle.

(Le Temps.)
J. Weber.

M. Francisque Sarcey analyse avec beaucoup de soin le genre qui a fait la fortune et la célébrité d’Offenbach et de ses deux collaborateurs habituels.

Il croit, du reste, que, dans la Périchole, Offenbach est en progrès.

La partition de la Périchole, dit M. Monselet, est du bon Offenbach, joli, brillant, alerte.

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