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Courrier des théâtres

Le Figaro – Mercredi 19 avril 1876

Notre correspondant particulier de Londres, M. Johnson, nous envoie une longue lettre rendant compte de la première représentation du Voyage dans la Lune, donnée samedi dernier au théâtre de l’Alhambra.
Nous en extrayons les passages suivants :

« La première représentation à Londres du Voyage dans la Lune avait une véritable importance à plusieurs points de vue, samedi soir, l’immense salle de l’Alhambra était donc comble. Il s’agissait non-seulement d’applaudir la musique d’Offenbach et le livret de MM. A. Mortier, Leterrier et Vanloo, mais encore de savoir si le public anglais adopterait l’opéra-féerique, genre nouveau ici et destiné, je l’espère bien, à remplacer les sottes et ennuyeuses pantomines de Noël.
Quatre mille spectateurs peuvent entrer à l’Alhambra et les recettes atteignent souvent le chiffre de 12,000 francs. Le nouveau directeur, M. Leader, vient de faire faire quelques heureux changements dans la disposition de la salle ; grâce à ces améliorations, grâce surtout aussi à l’excellente direction musicale de M. Georges Jacobi, la haute société va maintenant fréquenter ce théâtre, un des plus beaux de Londres.
La direction a risqué cent cinquante mille francs dans cette tentative. Elle paie en outre mille francs par semaine de droit aux éditeurs de la féerie. On voit que l’on jouait gros jeu et qu’il n’a pas fallu moins que l’habileté de M. Jacobi, qui a été chargé seul de toute la mise en scène, pour gagner la partie.
Je ne me souviens pas d’avoir vu à Londres un succès égal à celui-ci. Tous les morceaux de la princesse Fantasia, chantés par une délicieuse américaine, miss Kate Numrœ, ont été bissés. Mme Rose Bett, une Française, qui a appartenu à l’Opéra et aux Italiens de Paris, et qui s’est fait ici une grande réputation dans l’opérette, a chanté et joué Caprice avec un entrain énorme. On a bissé la scène des Charlatans, bissé le joli chœur de femmes qui suit et bissé presque tout le ballet de la Neige.
M. Justament était venu lui-même de Paris pour régler ses ballets. Il a été appelé sur la scène, ainsi que M. Jacobi, auquel on a fait une véritable ovation.
Mme la comtesse Gilbert des Voisins, c’est-à-dire Marie Taglioni, qui se trouvait dans une loge, a donné plusieurs fois le signal des applaudissements.
Décors et mise en scène sont splendides. En voilà pour un an au moins. »

Une dépêche de Vienne nous annonce que la même pièce, traduite en allemand, a été jouée dimanche soir au théâtre An der Wien, où elle a eu le même sort brillant.

Charles Darcours.

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