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La Soirée Théâtrale

Le Figaro – Dimanche 21 février 1875

(…) Les Répétitions de Geneviève.

(…) C’est à la Gaîté surtout que se recueillent, en ce moment, les choses amusantes et pittoresques.

Les répétitions de Geneviève de Brabant s’y poursuivent avec une ardeur fatigante pour les auteurs et les artistes, mais qui sera bientôt récompensée, puisqu’on compte jouer mardi prochain.

J’ai assisté ce soir à un bout de répétition. Le public, qui s’attend à des merveilles, sera servi à souhait. Sans commettre la plus légère indiscrétion, je puis dire que la mise en scène de Geneviève est non-seulement splendide comme celle d’Orphée et artistique comme tout ce qui se fait à la Gaîté, mais amusante, – ce qui est plus rare.

Seulement quelle rude besogne et comme le spectateur ne se doute guère du mal qu’il faut se donner pour le satisfaire !

Offenbach arrive au théâtre à sept heures et s’en va vers deux heures du matin. Enveloppé dans une pelisse fourrée, on le voit bondir sur la scène, faisant manœuvrer les masses, arrêtant l’orchestre, réglant les défilés, criant, gesticulant, chantant, armé d’une canne épaisse à laquelle il fait exécuter dans l’espace des courbes fantastiques. Ah ! cette canne… qu’elle m’a donc causé d’émotion ! Quand les choristes font une faute, quand les figurants ne se rangent pas assez vite, Offenbach se précipite vers eux, sa canne levée et comme s’il était décidé à faire quelque sanglant exemple. Mais il s’arrête à temps, – tout juste à temps, – et, au lieu des paroles de colère auxquelles ont s’attendait, c’est avec douceur qu’il dit :

– Mes enfants, ce n’est pas cela du tout !

Crémieux est moins nerveux, lui. Après avoir suivi toutes les premières répétitions et indiqué de qu’il avait à indiquer, il laisse faire maintenant, sûr que tout ira bien. Pendant les entr’actes qui sont fort longs, toute le personnel masculin de la Gaîté se répand dans les cafés et les brasseries des environs. Jamais on n’a autant consommé de choucroutes.

Par exemple, quand l’entracte est fini et qu’il s’agit d’en prévenir tout le monde disséminé aux alentours, on est obligé d’agiter une énorme cloche et de la promener dans la rue Réaumur et sur le boulevard Sébastopol. Ce qui apprend aux habitants du quartier qu’à la Gaîté on travaille pour eux.

UN MONSIEUR DE L’ORCHESTRE.

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