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La Soirée Théâtrale

Le Figaro – Mercredi 13 octobre 1875

Le tragédien Rossi continue ses représentations italiennes à la salle Ventadour. Elles attirent un public assez nombreux. Ce soir, il jouait Otello ; samedi prochain il jouera Hamlet.

Je n’ai jamais pu voir Otello sans me rappeler ce pauvre Albert Glatigny, qui endossa le manteau royal d’un sénateur dans la traduction française du drame de Shakespeare. Ce ne fut pas sa seule création dramatique. Glatigny on s’en souvient peut-être remplit également le rôle du monsieur qui passe, dans les Deux Aveugles. Ce rôle n’était pas écrasant. Il ne se composait que d’une scène unique le monsieur traversait le théâtre et jetait un sou à l’un des deux aveugles. Glatigny s’en acquittait merveilleusement. Un soir pourtant, le sou glissa à travers sa poche percée dans son soulier. Glatigny fit son entrée, chercha, vainement son sou, et comprit aussitôt ce qui venait de se passer. Il ne perdit point la tête, s’assit, ôta son soulier, y prit le sou, le jeta, puis continua son chemin. Ce fut dans la salle un énorme éclat de rire, mais néanmoins on retira son rôle au pauvre poète dont la carrière théâtrale se trouva brisée du coup.

Puisque je viens de parler des représentations de Rossi, qu’on me permette de rappeler à mes lecteurs l’article en italien ultra-fantaisiste que je consacrai à la première du grand artiste.

Tout le monde a parfaitement compris que la Soirée théâtrala par un signor d’il orchestro n’était qu’une simple plaisanterie.

Quand je dis tout le monde, il me faut pourtant constater quelques exceptions.

D’abord j’ai reçu de la part de plusieurs lecteurs français du Figaro, des lettres indignées, dans lesquelles on me reprochait d’avoir écrit un article dans une langue qui leur était inconnue.

Ces lecteurs ne s’étaient évidemment pas donné la peine de lire sérieusement mon article, sans quoi il leur eût été bien facile de comprendre que mon Italien était fabriqué par le procédé dont on parle dans M. Choufleury :

– Pour parler Italien il suffit d’ajouter no à tous les mots français.

– Ainsi, répond M. Choufleury, quand je demande mes bons journaux je dis bonjour en italien ?

– C’est cela !

(…)

Un monsieur de l’orchestre.

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