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Gazette de Paris

Le Figaro – Vendredi 27 mars 1868

(...)

Il faut espérer que là cruelle leçon que M. le président de Bordeaux a infligée à ce charcutier ne sera pas perdue. Quinze jours de solitude dans la prison de Bordeaux lui apprendront à ne pas abandonner son fromage d’Italie pour se mêler aux émeutiers de la ville. Dans l’âge mûr, un citoyen renie souvent les fautes de sa jeunesse. Ainsi je connais un homme qui a eu le tort d’être Belge à l’âge de vingt ans, et que j’ai retrouvé parfait Tyrolien plus tard, au théâtre des Menus-Plaisirs, dans la pièce d’Offenbach.

La première fois que j’eus l’avantage de rencontrer ce Tyrolien dans le monde... de l’Alcazar, je me disais déjà :

– Ces traits ne me sont pas inconnus. Où ai-je donc vu ce Tyrolien ?

Quelques jours après, flânant au foyer des Menus-Plaisirs, je me trouvai en présence de deux Tyroliennes et du Tyrolien.

– Il me semble, dis-je à ce dernier, que je vous ai déjà vu ailleurs. N’avez-vous pas voyagé en Allemagne ?

– Si, me répondit-il, j’ai chanté un peu partout, au-delà du Rhin, à l’époque où je n’étais pas encore tyrolien. Vous n’êtes donc pas compatriote d’André Hofer !

– Non, je suis de Liège.

– Et vous êtes Tyrolien ?

– Oui, monsieur, depuis mon mariage avec une Tyrolienne. Dans le temps, je disais la chansonnette française avec beaucoup de succès ; plus tard, je me suis résigné à cultiver le trou la la des montagnes.

D’explication en explication j’appris enfin toute la vérité sur ce Tyrolien d’occasion, né à Liège. Je me rappelle parfaitement l’avoir vu en Allemagne pendant les représentations d’une troupe hollandaise qui propageait en Allemagne le goût de la chansonnette française ; l’étoile de cette troupe hollandaise qui comptait au nombre de ses artistes un Belge et plusieurs Tyroliens, était une petite Parisienne âgée de dix ans, Zulma Bouffar, qui, grâce à son talent, devait plus tard se faire applaudir à Paris dans le répertoire d’Offenbach. Le comique français de cette troupe hollandaise était un Belge que je devais un jour retrouver à l’Alcazar sous un costume tyrolien.

(...)

Albert Wolff.

Vous pensez bien si je fus étonné. Quitter un Belge et retrouver dix ans après un Tyrolien, ce n’est pas une mince surprise.

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