Bouffes-Parisiens. – Reprise de Madame l’Archiduc, opérette en trois actes, de M. Albert Millaud, musique de M. Jacques Offenbach.
Si la reprise de Madame l’Archiduc avait eu lieu quelques jours plus tôt, les électeurs du quartier Monsigny auraient voté comme un seul homme pour Mme Anna Judic. Bulletins nuls, je le veux bien, mais qui n’en auraient pas moins constitué un signe des temps, malgré les prédictions de l’opérettophobe Sarcey. Mme Judic est adorée des électeurs qui fréquentent les Bouffes, à quelque arrondissement qu’ils appartiennent, et s’il fallait voter pour choisir la reine des divas, c’est toujours Marietta qui décrocherait la timbale.
Marietta a retrouvé lundi soir ses fidèles et ses dévoués d’un bout à l’autre de la pièce, soit dans le P’tit bonhomme pas plus haut qu’ça, soit dans le Tais-toi, tais-toi !... soit dans le célèbre Pas ça !... pas ça !..., elle a tenu son brillant auditoire sous le charme de sa voix si fraîche et si caressante.
Près d’elle, sous l’uniforme du capitajne Fortunato, Paola Marié jouait un rôle qu’elle avait appris en quatre jours. Difficile besogne, responsabilité assez lourde. Mais les capitaines de dragons ne connaissent pas d’obstacles : Mlle Paola a tout enlevé à la pointe de son sabre. Bien que le rôle écrit pour Mme Grivot ne soit pas dans ses cordes, elle l’a fort bien chanté et elle a même réussi à taire bisser les couplets du troisième acte : Je suis le plus gentil des trois. Une veine que ces couplets-là n’avaient jamais eue.
Daubray, Habay et Fugère ont droit à quelques éloges. Le premier de ces, artistes a obtenu, au troisième acte, un succès de mauvais goût, qu’il ne doit attribuer qu’à son costume.
En, résumé, la pimpante, partition de M. Offenbach a été entendue avec un plaisir nouveau et très réel.
Un dernier mot – qui n’a pas trait à Madame l’Archiduc – mais seulement à ses deux principales interprètes :
J’entends dire que Mmes Judic et Marié vont jouer lundi, aux Variétés, dans une matinée au bénéfice de Mme Victor Boullard... les Deux Aveugles !!! Capoul et Maurel se sont passé cette fantaisie... à New-York. Mais je ne vois pas ces deux jolies femmes s’affublant des oripeaux de Patachon et de Giraffier. Quand ces tentatives-là ne sont pas extrêmement réussies, elles sont navrantes. Si ces dames veulent prêter leur concours à une infortune intéressante, elles peuvent se laisser afficher dans des chansonnettes, mais non compromettre leur talent gracieux dans une exhibition inutile.
Si pourtant cette exhibition a lieu et qu’elle ajouta à la gloire des deux étoiles, je le constaterai sans amertume.
X.