Samedi, les Bouffes-Parisiens ont donné la première représentation de Geneviève de Brabant, M. Jouvin en rendra compte dans son prochain feuilleton. Mais ce n’est pas empiéter sur son domaine que de dire que M. Offenbach, s’inclinant respectueusement devant les décisions du public, a, dès la seconde représentation, retranché un tableau entier et changé le dénoûment ; la pièce se termine maintenant par un bal chez Golo dont les divertissements criminels sont troublés par l’entrée de Sifroid revenu de la Palestine avec un congé de réforme dans un rouleau de fer-blanc.
Toutes les chansons populaires ont été supprimées ; elles sont très agréablement remplacées par un quadrille à grand tralala. Mademoiselle Tautin y danse à elle seule un pas de deux. Le bal se termine par un final qui est invariablement bissé tous les soirs.
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« N’empruntez jamais rien à vos amis, dit un proverbe, si vous voulez entretenir de bonnes relations avec eux. » – A quoi bon alors avoir des amis ? Au risque de nous brouiller avec le Figaro-Programme, nous allons donner, d’après ce journal, la composition de la salle des Bouffes à la première de Geneviève de Brabant.
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« On dit toujours que la salle d’Offenbach est trop petite. Je ne veux pas rappeler le mot de Socrate, je ne sais pas assez de grec pour cela, mais convenons que, grâce à sa popularité, ce théâtre remplace singulièrement la quantité par la qualité. J’ai assisté à bien des solennités dramatiques, j’en ai peu vu dont l’auditoire fût aussi remarquable sous tous les rapports.
Voulez-vous des noms ? En voici, je cite de mémoire. Ce sera miracle si je n’oublie personne.
L’aristocratie était représentée par la princesse Gagarine, le prince Gortschakoff, le prince Poniatowski, le duc de Grammont, le baron Pelletan, le duc de Rovigo, le prince de Bauffremont, le maréchal Magan, M. de Montguyon, le prince Bonaparte, M. Gauthier, secrétaire général de la maison de l’Empereur, le prince de Masséna, M. de Talleyrand, M. de Brady, aide de camp de Sa Majesté, le baron Clément, des guides, le vicomte d’Argout, le comte Gabrieli, etc., etc. ;
La finance par MM. Pereire, Agaudao, Biestat, Rodrigues, Millaud, Emile Crémieux, etc. ;
La Comédie-Française, par mademoiselle Augustine Brohan ;
L’Opéra, par mesdemoiselles Taglioni, Livry et M. Alphonse Royer.
Parmi les directeurs de théâtres passés, présents ou futurs, on remarquait MM. Perrin, Duponchel, Th. et H. Cogniard, Edouard Monnais, etc.
La littérature, la presse, les arts avaient envoyé MM. Camille Doucert Decourcelles, Hector Crémieux, Bénédict Masson, Meyerbeer, Méry, Edmond Texier, Jules Janin, Lablache, Saint-Victor, Charles Edmond, Alexis Azvédo, Heugel, Albéric Second, Chadeuil, Henri de Pène, etc., etc.
Enfin la magistrature était représentée par M. Partarieu-Lafosse ;
La médecine, par le docteur Tardieu ;
Et la pâte Regnault, par le docteur Véron… »
GEORGES DAVIDSON.
P.S. – Lundi, aux Bouffes-Parisiens, représentation PAR ORDRE de S. A. I. la grande-duchesse Marie, après avoir assisté à la deuxième représentation de Geneviève, aurait daigné manifester à M. Offenbach le désir d’entendre les Dames de la Halle et le Mariage aux Lanternes. – C’est un grand honneur pour ce petit théâtre. (…)