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Théâtre Italien

Le Figaro – Jeudi 13 mars 1856

(…)

Pepito, représenté, il y a deux ans, aux Variétés, vient de reparaître sur une scène plus musicale. Pradeau a remplacé Leclère ; M. Petit-Delamarre, le ténor Biéval, et une débutante, mademoiselle Hesmez, a pris le rôle joué à l’origine par mademoiselle Larcena.

Pepito est un véritable opéra comique et une pièce raisonnablement faite, et voilà justement ce qui manquait aux Bouffes depuis la réouverture de la salle Choiseul. Nous autres, écrivains, nous venons chercher à ce petit théâtre un délassement à nos travaux, y faire, en quelque sorte, une débauche d’esprit de gaîté. Je J’avouerai à ma honte, sans scrupule et sans remords, je me laisse volontiers distraire de la musique par les cascades de Pradeau et il arrive que les points-d’orgue de mademoiselle Dalmont ne me réjouissent pas, à beaucoup près, autant que les Avidem et les
floc-floc du bouffon Léonce. Après un pareil aveu, je livre ma tête à Offenbach.

Mais le public n’est pas de mon avis, et je l’ai vu se scandaliser très fort et se fâcher tout rouge aux désopilantes folies de Ba-ta-Clan, qui avaient le don de me divertir. Il est évident que Boileau nous a gâtés le goût avec son proverbe :

« Il faut même en chansons du bon sens et de l’art. »

Pepito est donc venu tout exprès pour remplir les conditions de ce programme, et les spectateurs ne manqueront pas de fredonner, en rentrant chez eux, le refrain de la chanson à boire.

Pradeau a joué la scène d’ivresse, non plus en cascadeur, mais en comédien. Il est impossible de faire avec plus de vérité le récit de ses infortunes de serpent.

Mademoiselle Hesmez a du charme, de l’intelligence et de la distinction. Seulement, sa voix, un peu lourde, se meut difficilement dans les choses de légèreté, et ne saurait se poser qu’à la condition d’interpréter de la musique large.

Le soir où le théâtre reprenait Pepito, il l’a fait suivre d’un divertissement exécuté par six jeunes danseuses. Ce petit ballet, qui a été fort goûté et qui dure à peine quelques minutes, a nom la Provençale. A la bonne heure ! et je me réjouirai sincèrement de cette réussite, si elle peut enterrer, une bonne fois pour toutes, Pierrot clown, la Statue de l’Alcade, et le genre si mortellement ennuyeux de la pantomime, cette erreur sans esprit du public parisien.

B. Jouvin.

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