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Les Théâtres

Le Charivari – Lundi 13 février 1860

BOUFFES-PARISIENS : le Carnaval des revues, revue de carnaval en deux actes et neuf tableaux, paroles de MM. Grangé et Gille, musique de M. Offenbach. — PALAIS-ROYAL : la Pénélope à la mode de Caen, parodie de M. Grangé. — THEATRE-DEJAZET : Fanchette, opéra-comique, paroles et musique de M. Eugène Dejazet. — Nouvelles.

La représentation de vendredi aux Bouffes-Parisiens a permis de constater qu’en fait de revues il est plus facile de tomber à couplets raccourcis sur celles des autres théâtres que d’en faire une qui leur soit de beaucoup supérieure. Le Carnaval des revues, dont le prologue est ambitieux comme une déclaration de principes, n’a pas ouvert de voie nouvelle pour la fabrication des ouvrages de ce genre et s’est contenté du cadre dont on nous a donné déjà tant de surmoulures.

C’est à dire que les inventions modernes, les succès du jour, les ridicules éclos dans l’année y sont parodiés absolument comme dans la revue des Variétés, comme dans celle du Palais-Royal et comme dans celle des Folies-Dramatiques. La question des droits d’auteur, représentée par les morts Gluck, Mozart, Weber et Grétry, en lutte avec un auteur vivant ; l’ancien diapason, les patineurs du bois de Boulogne, les vivandières des zouaves et les zouaves des vivandières, les épisodes de la guerre de Chine, enfin jusqu’au monsieur qui, armé d’une lorgnette, demande sa femme infidèle aux décors d’alentour, tout le cortège obligé défile devant le public. Heureusement il a eu la bonne idée de défiler musique en tête.

« Quoiqu’il y ait dans le poème plusieurs scènes très réussies, entre autres celle où le musicien de l’avenir vient donner un spécimen de son savoir-faire en chantant la Tyrolienne de l’avenir, la véritable et grande raison de succès pour le Carnaval des revues réside dans cette fantaisie particulièrement heureuse d’avoir groupé en un seul ouvrage des morceaux empruntés aux plus célèbres partitions d’Offenbach. Jamais le talent de l’auteur de Bataclan, des Deux Aveugles, d’Orphée, etc., n’a été mieux mis en lumière et applaudi d’une façon plus concluante. C’est un chapelet de motifs dont le moins réussi est un bijou. Je ne sais si en ce moment je m’expose à une rectification, mais il me semble avoir saisi parmi les airs anciens quelques airs nouveaux qui certes n’ont rien à envier à leurs aînés. Je citerai spécialement le couplet de facture chanté par la Parodie.

Mlle Tautin, qui jouait les Bouffes-Parisiens, a nécessairement accaparé les plus jolis morceaux et les effets les plus saillans. Elle sait assez les faire valoir pour que nous ne songions pas à nous en plaindre.

Léonce n’a qu’un rôle épisodique dont il n’a pas trouvé moyen de sortir un peu par une de ces phrases d’aliéné comme il en improvise d’ordinaire aux premières et même aux centièmes représentations.

Désiré est très amusant quoique un peu forcé. Pourquoi a-t-il refusé de venir accompagner de nouveau la tyrolienne redemandée par toute la salle à son camarade Bonnet ?

Tant de fiel entre-t-il dans l’âme d’un comique ?

Les revues de fin d’année ayant à peu près toutes amené leur pavillon, le Carnaval des revues va probablement triompher sur leurs débris. Il n’y a plus que celle des Variétés, Sans queue ni tête, qui fait salle comble tous les soirs et pourrait bien rester longtemps encore une dangereuse concurrence pour la nouvelle venue.

(...)

Henri Rochefort.

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